Les organisations internationales de lutte contre l’impunité et de défense des droits de l’homme recommandent l’allègement par le gouvernement congolais de la procédure d’exécution des réparations au profit de victimes des crimes internationaux commis en République démocratique du Congo.
La recommandation est contenue dans le rapport d’étude sur la stratégie de poursuite et le policy brief sur la politique des réparations en République démocratique du Congo.
Le rapport a été présenté aux hauts magistrats, experts judiciaires et partenaires au cours d’un atelier organisé mercredi à l’Hôtel Sultani à Kinshasa. Une initiative du Programme de l’ONU pour le développement, RCN- Justice et Démocratie, Avocats sans Frontières et l’Ong Trial International.
Selon cette étude, en 20 ans de lutte contre l’impunité en RDC, des avancées ont été enregistrées. Plus de 50 dossiers des crimes internationaux notamment des crimes de guerre et crimes contre l’humanité ont été traités.
Des verdicts de condamnation ont été prononcés dont les dédommagements des victimes par les coupables et l’État congolais.
Cependant, la majorité de victimes n’ont jamais pu obtenir ces dommages et intérêts de la part du gouvernement tels que décidés par les magistrats.
L’étude note qu’à ce jour une seule décision de réparation a été exécutée. Voilà pourquoi les Ong internationales de lutte contre l’impunité recommandent aux autorités congolaises la réforme de la procédure d’exécution des réparations en faveur des victimes de ces crimes.
Le cas du dossier Mulenge
Le coordonnateur national de Trial International en RDC, Me Guy Mushata a déploré cette lourdeur de l’administration congolaise qui ne permet pas aux victimes vainqueures des procès d’être dédommagées.
Il a cité pour exemple le cas du dossier Mulenge pour lequel toutes les étapes de la procédure ont été suivies normalement, mais plus de 5 ans après la fin de toutes les démarches, le gouvernement n’a toujours pas indemnisé ces femmes victimes.
“C’est depuis 2011 que ces femmes avaient obtenu la décision judiciaire de réparation issue de leur procès. Mais, jusqu’aujourd’hui, elles n’ont rien obtenu alors que le dossier a suivi la procédure normale”, explique Me Mushata qui propose aussi de rapprocher les victimes du lieu d’exécution de ces réparations afin de les rassurer.
“Il est nécessaire de simplifier la procédure pour la réparation ; comme la peine d’emprisonnement est exécutée par l’État à travers le magistrat du parquet, les dommages et intérêts pourraient aussi être exécutés à travers le même ministère public”.
L’avocat propose aussi que le gouvernement provincial de la province d’origine des victimes soit le point d’exécution des réparations.
Les frais de justice, un frein pour les réparations
Outre la lourdeur de la procédure, le coordonnateur national de l’Ong Trial International a aussi relevé la problématique des frais de justice qui constitue aussi un blocage pour les victimes qui sont en général des personnes démunies et vulnérables.
“La victime qui doit être indemnisée doit se préparer à payer les frais de justice qui comprennent non seulement les frais liés à la procédure, mais aussi le droit proportionnel ( 3% du montant à recevoir comme frais de réparation) qui peut être très élevé pour la victime”, souligne maître Mushata.
Les participants à l’atelier ont aussi reconnu que les frais de justice constituaient un blocage pour l’avancement des dossiers et l’exécution des réparations pour les victimes.
Selon cette étude présentée lors de l’atelier, la République démocratique du Congo doit près de 28 millions de dollars à plus de 3300 victimes des crimes internationaux commis sur son sol.
Manzu Lydie