La Compagnie Jacques Bana Yanga est en résidence de création, à l’Institut français de Kinshasa, du spectacle de danse «RD Congo Miroir sape sape».
Le spectacle dont la sortie est projetée pour le 23 avril 2021, planche sur des cris. Des cris ? Des cris que l’on rit, macabres, des cris que l’on pleure, insoumis. Des cris poussés par un homme, spectateur impuissant, d’un pillage sans fin, celui de son pays.
Ce spectacle parle d’un monde qui se gave de ses habitants, qui n’a plus de mots pour raconter l’effroi. Voilà ce que semble dire l’homme à ses pairs. Miroirs sur le plateau, ces presque-riens, ces hommes poussières beuglent, eux-aussi, bouche ouverte, corps en bataille, ils cherchent en eux ou en l’autre la rage de vaincre l’image imposée par les arrangements du monde. On décide sans eux, ils subissent en pleine gueule.
Derrière les masques des damnés, l’élégance de ceux qui se font chanter pour adoucir les mots qu’ils déterrent, qui sapent allure et pensée afin de tenir debout malgré tout.
«RD Congo Miroir sape sape» est un spectacle où danse et musique dialoguent afin de faire surgir la pulsation de vie derrière la catastrophe. Depuis plus de 12 ans, Jacques Bana Yanga, chorégraphe et danseur dans ses propres spectacles, puise son langage et sa ténacité tonitruante, dans le quotidien des quartiers populaires de Kinshasa.
Il peint dans ses spectacles ce qui se raconte à Bandalungwa, ce qui se vit à Matonge, ce qui s’expérimente à Masina. Jacques Bana est branché aux vibrations de Kinshasa. Il s’empare de ce qui gronde dans ces coins de cette ville province et ces grondements constituent pour l’artiste la matière première pour ses chorégraphies.
Sur le plan artistique pour cette création, en plus de quatre danseurs qui l’accompagnent depuis le début, sont venus s’ajouter une danseuse, un sapeur et quatre musiciens. Ensemble sur le plateau, ils se regardent nus, s’inspectent pour cesser d’être aveugles, cherchent à percevoir ce qui se joue derrière leur reflet.
Devant cette démarche sur leur véritable identité, une série de questions se posent : Qui sommes-nous ? Quelle est notre place ? Comment sortir du paradoxe, de la blague, du mensonge qui nous donne beau à l’extérieur alors que nous sommes détruits à l’intérieur.
Saint Hervé M’Buy